Coup de coeur du mois

 


    Coup de cœur de juin

       Isabelle Cousteil 


Coup de cœur pour les vaillants et pour une ville qui pulse  

 

En ces temps d’inquiétude -encore- quant au sort des auteurs et artistes, de leurs possibilités de trouver des scènes, de pouvoir produire, se produire ; alors que les « pass culture » sont bazardés et que les subventions DRAC pour faire intervenir les artistes auprès des scolaires sont soufflées, mon cœur va à tous ces élans, inventions, bricolages de génie, à ces créations de toute pièce, de toutes pièces, à ces scènes improvisées, à ces festivals portés par d’industrieuses et altruistes abeilles 

Je mémerveille, et plus encore, je m’émeus chaque jour de voir cette énergie, cette générosité de toutes celles et ceux, nombreux, qui offrent leurs voix, leur « matos », leurs heures pas comptées, mais aussi leurs jardins, appartements, cours, galeries, entrepôts, bars, demi, quart et tiers-lieux. Ils ouvrent en grand les portes aux auteurs, créateurs, interprètes, dans un vibrant partage sans distinction d’âges, de moyens, d’origines, d’opinions. 

Ces murs qui tombent, ces voix qui portent, ces mots qui volent, ces gens qui font cuisine commune et savoureuse de leurs découvertes, de leur appétit de les clamer, déclamer et proclamer nous permettent de respirer, de supporter les maux du temps et de croire un instant que la créativité et la générosité puissent avoir le dernier mot. 

À eux va mon cœur, et à cette ville qui désormais est la mienne, Arles, si multiple, si foisonnante, si ouverte. Dessin, photo, danse, musique, résidences de création et d’écriture, s’emparent d’elle presque toute l’année désormais. Et pas juste pour les nantis ou les touristes. Au joli mois de mai, la poésie s’est accrochée aux balcons et déversée dans les rues hautes durant deux Nuits, tandis qu’en même temps, les Bazarettes semaient les « dits » de femmes aux quatre coins de la ville, rencontres d’autrices, ateliers d’écriture, scènes de lectures.  Les collectifs d’artistes – Dînamots, Isba, Rouge et Vert, Moineau, Gratte Ciel pour ne citer qu’eux parmi tant d’autres…- irriguent la ville et, en ateliers ou autour de scènes chaleureuses comme des feux de joie, se mêlent familles et gamins de toutes cultures venus écouter, écrire, interpréter. Venus s’évader et s’imaginer, peut-être, un futur meilleur.  

Là, bien loin des moquettes épaisses des ministères et des couloirs cirés des administrations, nous sommes au cœur battant de ce qui nous fait sentir grands et fiers et chanceux : consacrer le plus clair de notre vie aux mots et à leur voyage, contre vents et marées, de l’un.e à l’autre, le plus loin et le plus longtemps possible. 

 

Isabelle Cousteil